Précision utile sur la caractérisation du délit de diffusion d'informations fausses ou trompeuses
La nécessaire transmission à l’AMF de l’information sur l’existence d’un contentieux, lorsqu’une société cotée est en cause, ne peut constituer une diffusion publique par le fait du prévenu au sens de l’article L. 465-2, alinéa 2, du Code monétaire et financier.
Cass. crim., 28 sept. 2016, n° 14-88533
1. En cette année 2016, le droit pénal financier est à « l’honneur ». En effet, outre la loi n° 2016-819 du 21 juin 2016 réformant le système de répression des abus de marché1, la jurisprudence du Conseil constitutionnel2 comme celle de la chambre criminelle de la Cour de cassation3 ont eu l’occasion de se prononcer en la matière par plusieurs décisions remarquées. Un arrêt de la Haute juridiction du 28 septembre 2016 attire plus particulièrement l’attention.
2. La société A., société foncière cotée sur le marché Euronext, avait fait citer M. X. devant le tribunal correctionnel des chefs de manipulation de cours, diffusion d’informations fausses ou trompeuses et escroquerie au jugement, soutenant que celui-ci, dans le cadre d’un contentieux d’actionnaires, avait déposé, auprès du président du tribunal de commerce de Paris, une requête en séquestre des dividendes de la société, fondée sur des moyens mensongers, et obtenu cette mesure dans le but d’aboutir sciemment à la suspension par l’AMF, informée de cette décision, de la cotation du titre A.
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Sur ce texte, v. Conac P.-H., « La loi du 21 juin 2016 réformant le système de répression des abus de marché », BJB juill. 2016, n° 114n0, p. 323 ; Lasserre Capdeville J., « Présentation succincte de la réforme du droit financier », AJ pénal 2016, n° 9, p. 424 ; Bonneau T., « La réforme du système de répression des abus de marché », JCP E 2016, 1412.
Cons. const., 14 janv. 2016, n° 2015-513/514/526 QPC : BJB mars 2016, n° 113d8, p. 90, note Bonneau T. – Cons. const., 30 sept. 2016, n° 2016-572 QPC : AJ pénal 2016, obs. Lasserre Capdeville J., à paraître.
Cass. com., 5 juill. 2015, n° 15-29098 et 15-29144. Cass. crim., 28 sept. 2016, n° 14-88533.
Devant la cour d'appel de Paris, des interrogations s'étaient également posées à propos du délit de manipulation de cours. Sur ce point, les juges du fond avaient estimé « qu'une action judiciaire intentée à l'encontre d'une société cotée n'est pas susceptible de recevoir les qualifications de manipulation de cours ou de diffusion d'informations fausses ou trompeuses ».
Sur ce délit, Conte P. et Blanchard C., « Marchés d'instruments financiers. Activité des marchés d'instruments financiers », J.-Cl. Pénal des affaires, fasc. 20, 2013, n° 49 et s.
Lucas de Leyssac M.-P. et Mihman A., Droit pénal des affaires, 2009, Economica, n° 731.
Le délit, nettement simplifié, figure désormais à l'article L. 465-3-2, I, du code.
L'incrimination en question est intentionnelle, Cass. crim., 23 mars 2011, n° 10-81517 : Dr. sociétés 2011, comm. 121, obs. Salomon R. Cet élément intentionnel sera souvent déduit par les juges des circonstances de fait, v. Cass. crim., 15 mai 1997, n° 96-80399 : D. aff. 1997, p. 924 ; Rev. sociétés 1998, p. 135, obs. Bouloc B.
Il pourra s'agir, par exemple, d'un dirigeant social (Cass. crim., 17 mai 2006, n° 05-81758 : Dr. pén. 2006, comm. 114, obs. Robert J.-H.), d'un commissaire aux comptes (T. corr. Paris, 27 févr. 1998) ou encore d'un simple concurrent (T. corr. Paris, 9 janv. 2004 : Dr. société 2004, comm. 69, obs. Salomon R. ; BJB mai 2004, n° 59, p. 255, note Ducouloux-Favard C. ; RTD com. 2004, p. 782, obs. Rontchevsky N.). Il faudra uniquement, et c'est logique, que cette personne puisse être identifiée (CA Paris, 15 déc. 1989 : Dr. sociétés 1991, comm. 38, obs. Robert J.-H.).
CA Paris, 13 mai 1998, n° 97/05555. CA Paris, 16 déc. 1998, n° 98/00828.
Dans ce cas, l'information est totalement contraire à la vérité. V. par ex., Cass. crim., 29 nov. 2000, n° 99-80324 : Bull. crim. 2000, n° 359 ; RTD com. 2001, p. 493, obs. Rontchevsky N. ; Rev. sociétés 2001, p. 380, obs. Bouloc B. T. corr. Paris, 12 sept. 2006: BJB janv. 2007, n° 4, p. 37, note Dezeuze E.
Ici, l'information ne sera pas intrinsèquement fausse, mais de nature à induire en erreur, Cass. crim., 4 nov. 2004, n° 03-82777 : BJB mai-juin 2005, n° 79, p. 257, note Rontchevsky N. ; TGI Paris, 21 janv. 2011 : RSC 2012, p. 571, obs. Stasiak S. ; BJB avr. 2011, n° 123, p. 236, note Lasserre Capdeville J.
T. corr. Paris, 20 déc. 1990 : Gaz. Pal. 1991, 1, 461, note Marchi J.-P.
T. corr. Paris, 9 janv. 2004 : Dr. sociétés 2004, comm. 69, obs. Salomon R. ; BJB mai-juin 2004, n° 159, p. 255, note Ducouloux-Favard C. ; RTD com. 2004, p. 782, obs. Rontchevsky N.
CA Paris, 16 déc. 1998, n° 98/00828. CA Paris, 17 mai 1999, n° 98/04792.
Cass. crim., 15 mars 1993, n° 92-82263 : Bull. crim. n° 113.
Cass. crim., 15 mai 1997, n° 96-80399 : D. aff. 1997, p. 924 ; Rev. sociétés 1998, p. 135, obs. Bouloc B.
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