Débat sensible sur le champ d'application respectif des procédures collectives commerciales et civiles
La Cour de cassation rappelle avec force qu’un sujet de droit qui exerce une activité libérale en tant qu’associé dans une société civile professionnelle n’est pas éligible aux procédures collectives du livre VI du Code de commerce de sorte que, si les conditions sont, par ailleurs, réunies, il peut valablement demander à bénéficier de la procédure de traitement du surendettement des particuliers.
Cass. 2e civ., 1 juin 2017, n° 16-17077
1. Chacun sait que la loi du 26 juillet 2005 a pris, notamment, le parti d’étendre le champ d’application du livre VI du Code de commerce aux professionnels libéraux. Si la formule utilisée par le texte qui se réfère à « une activité professionnelle indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé » dépasse, en réalité, cette cible, il s’agissait surtout d’ouvrir l’accès aux membres des professions libérales à ces procédures, étant entendu que, jusqu’alors et à leur grand dam, ils échappaient à toute procédure de règlement de leurs dettes professionnelles. En effet, inéligibles naguère aux dispositifs du Code de commerce au motif que de tels processus demeuraient la « rançon de la commercialité »1, ces sujets de droit ne bénéficiaient pas non plus des procédures de surendettement des particuliers, absolument réfractaires à l’époque2 à restructurer[...]
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V. dans ce sens, Lucas F.-X., Manuel de droit de la faillite, 2016, PUF, n° 90.
V. not. sur cette problématique, Saint-Alary-Houin C., Droit des entreprises en difficulté, 10e éd., 2016, LGDJ, spéc. n° 420.
V. Cass. 2e civ., 8 avr. 2004, n° 03-04013, qui rappelle que l’appréciation du surendettement d’une personne ne peut avoir lieu qu’en considération de ses dettes non professionnelles. V. toutefois sur la possibilité de prendre en compte, dans un second temps, des dettes professionnelles dans l’élaboration du plan, Cass. 2e civ., 15 nov. 2007, n° 05-15094 : RD bancaire et fin. 2008, comm. 50, obs. Piedelièvre S. Au demeurant, l’alinéa 4 de l’article L. 711-1 du Code de la consommation brouille aujourd’hui quelque peu les frontières car il reconnaît que : « L’impossibilité de faire face à un engagement de cautionner ou d’acquitter solidairement la dette d’un entrepreneur individuel ou d’une société caractérise également une situation de surendettement. » Adde, sur les difficultés d’articulation en la matière au regard des diverses procédures issues du Code de la consommation, Borga N., « Livre VI du Code de commerce et surendettement des particuliers, concurrence ou complémentarité ? », BJE sept. 2012, n° 162, p. 316, spéc. n° 2.
V. not. à propos d’un kinésithérapeute, Cass. com., 30 sept. 2008, n° 07-15446 : Gaz. Pal. 22 janv. 2009, n° H3268, p. 25, note Lebel C. ; JCP E 2008, 2492, note Marmoz F. ; Act. proc. coll. 2008, comm. 277, obs. Salhi K. ; D. 2008, p. 2501, obs. Lienhard A. ; D. 2008, p. 2749, obs. Bélaval M.-L. ; JCP G 2008, IV 2726.
Cass. com., 9 févr. 2010, n° 08-15191, FS-PBRI ; Cass. com., 9 févr. 2010, n° 08-17670, FS-PBRI ; Cass. com., 9 févr. 2010, n° 08-17144, FS-PBRI : JCP G 2010, 602, note Barbièri J.-F. ; JCP E 2010, 1267, note Cerati-Gauthier A. ; Dr. sociétés 2010, comm. 76, note Legros J.-P. ; BJE mars 2011, n° 1, p. 12, note Martineau-Bourgninaud V. ; Rev. proc. coll. 2010, comm. 148, note Saintourens B. ; Act. proc. coll. 2010, alerte 70, note Vallansan J. – v. aussi TGI Valenciennes, 11 juin 2015 : Act. proc. coll. 2015, alerte 186 – en sens inverse, v. not., CA Paris, 18 sept. 2008, n° 07/17034 : D. 2008, p. 2666 ; JCP E 2008, 2436, note Cerati-Gauthier A.
Le contenu de ces textes se trouve dorénavant dans C. consom., art. L. 712-1, L. 731-1 à L. 731-3, L. 712-3 et L. 761-1.
Les textes envisagent respectivement le périmètre de la procédure de redressement judiciaire et de la liquidation judiciaire.
V. toutefois pour la situation de l’EIRL, C. consom., art. L. 711-7 et L. 711-8.
V. récemment dans le même sens pour un agent commercial, Cass. 2e civ., 23 juin 2016, n° 15-16637 : Act. proc. coll. 2016, comm. 178, obs. Fin-Langer L. ; Rev. proc. coll. 2016, comm. 133, obs. Saintourens B.
V. not. en ce sens, Regnaut-Moutier C. et Vallansan J., « Le périmètre d’application des procédures collectives : la répartition entre la procédure commerciale et la procédure consumériste », Rev. proc. coll. 2011, dossier 2, spéc. n° 19.
V. not. en ce sens, Vincent C., « La qualité du débiteur dépourvu d’entreprise », JCP E 2016, 1340, spéc. n° 22. Selon l’auteur, « (…) l’exercice de leur activité professionnelle au sein de la société confère aux associés la qualité de professionnels indépendants qui devrait leur permettre de bénéficier du livre VI du Code de commerce alors même qu’ils n’exploitent pas d’entreprise individuelle ».
Comme tout professionnel libéral, chaque associé répond sur l’ensemble de son patrimoine des actes professionnels qu’il accomplit, la société étant solidairement responsable avec lui. V. not. sur cette question, Cozian M., Viandier A. et Deboissy F., Droit des sociétés, 29e éd., 2016, LexisNexis, spéc. n° 1617.
Pérochon F., Entreprises en difficulté, 10e éd., 2014, LGDJ, spéc. n° 293.
V. not. en ce sens, Regnaut-Moutier C. et Vallansan J., « Le périmètre d’application des procédures collectives : la répartition entre la procédure commerciale et la procédure consumériste », Rev. proc. coll. 2011, dossier 2, n° 20.
V. sur cette question, Saint-Alary-Houin C., Droit des entreprises en difficulté, 10e éd., 2016, LGDJ, n° 420.
Selon C. consom., art. L. 711-1, « La situation de surendettement est caractérisée par l’impossibilité manifeste de faire face à l’ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir ».
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