Révocation judiciaire du gérant unique de SARL : vacance du pouvoir et pouvoir du juge
La révocation judiciaire du gérant d’une SARL entraînant vacance de la gérance, une cour d’appel ordonna la désignation d’un administrateur avec mission de convoquer et de présider l’assemblée générale des associés. Pouvait-elle également en fixer l’ordre du jour ? Oui selon la Cour de cassation, si la décision des juges est motivée, qu’ils ne s’immiscent pas dans la gestion de la société et respectent les pouvoirs et la liberté de vote des associés. Une solution opportune ou opportuniste ?
Cass. com., 26 avr. 2017, n° 15-19472
Peu importe que celle-ci soit inédite : les décisions statuant sur la révocation judiciaire d’un gérant de SARL sont trop rares pour être ignorées. Et celle-ci mérite une particulière attention en ce qu’elle intéresse les suites induites d’une révocation entraînant vacance de la gérance.
En l’espèce, Mme X, associée, et M. Y, associé et gérant, détenaient respectivement 42,71 % et 41,04 % du capital d’une SARL. La première reprochant au second sa gestion l’assigna ainsi que la société en vue de sa révocation. Elle sollicita également la désignation d’un mandataire ad hoc ayant pour mission de réunir une assemblée générale nommant un nouveau gérant. La cour d’appel accéda à ces demandes. Sa décision fait l’objet d’un pourvoi en cassation du gérant révoqué. Celui-ci se compose de trois moyens contestant le premier, le fond de la[...]
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L’absence de « cause légitime ».
La désignation à tort d’un « administrateur provisoire » et le dépassement de ses pouvoirs par la cour d’appel qui avait elle-même fixé l’ordre du jour de l’assemblée.
Par ex. : Monnet J., obs. ss Cass. com., 10 juill. 2007, n° 06-13520 : Dr. sociétés 2008, comm. 56 : « D’un point de vue plus général, la révocation judiciaire des dirigeants est destinée à intervenir lorsque les circonstances de fait (gérant majoritaire) ou de droit (clause statutaire exigeant que la décision de révocation soit prise à une majorité qualifiée) mettent le dirigeant à l’abri de toute décision collective mettant fin à ses fonctions. »
Triplement du loyer commercial dû par la SARL…
Le dirigeant viole une obligation légale inhérente à son statut.
C. com., art. L. 223-27, al. 7 : « Tout associé peut demander en justice la désignation d’un mandataire chargé de convoquer l’assemblée et de fixer son ordre du jour. »
C. com., art. L. 223-27, al. 8 : « En cas de décès du gérant unique, (…) tout associé convoque l’assemblée des associés à seule fin de procéder au remplacement du gérant. »
Le raisonnement de la cour d’appel était cohérent : après avoir constaté la vacance de la gérance, la désignation d’un administrateur provisoire s’imposait, non celle d’un mandataire ad hoc comme l’associé requérant l’avait demandé. Le deuxième moyen du pourvoi critiquait cet aspect de l’arrêt d’appel. La terminologie flottante, que la Cour de cassation ne corrige pas, contribue à troubler le fondement de l’action en justice.
L’argument se comprend en opportunité : en convoquant l’assemblée à seule fin de désigner un nouveau gérant, rien n’aurait interdit aux associés de reconduire celui révoqué dans ses fonctions…
Soit constater la révocation de M. Y et nommer Mme X en remplacement.
Distinction déjà évoquée (Cass. com., 19 déc. 2006, n° 05-17671).
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