La rupture d'un commun accord dans le cadre d'un accord collectif portant rupture conventionnelle : un nouvel outil de restructuration
Nouveau dispositif issu des articles 10 et suivants de l’ordonnance du 22 septembre 2017 n° 2017-1387, la rupture d’un commun accord dans le cadre d’un accord collectif portant rupture conventionnelle est présentée comme un nouvel outil de restructuration. L’introduction de ce mécanisme s’inscrit dans la démarche, entamée depuis plusieurs années, dont l'objectif est de sécuriser les différents mécanismes de départs volontaires de nature collective. Toutefois, la place et l’utilisation de ce mode de rupture original interrogent.
Des sentiments contradictoires apparaissent naturellement face à la nouveauté. Il va de soi qu’en droit, comme ailleurs, les habitudes sont rassurantes de sorte qu’il est parfois tentant de préférer utiliser ce qui est connu plutôt qu’un nouveau dispositif dont la place suscite des interrogations. Pourtant, le changement – lorsqu’il intervient – trouve naturellement son origine dans les limites, voire dans les lacunes de la situation présente. Il devient ainsi nécessaire de se détacher du passé pour construire l’avenir. L’analyse de la rupture d’un commun accord dans le cadre d’un accord collectif portant rupture conventionnelle collective est un exemple de ce tiraillement.
Innovation[...]
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Ord. n° 2017-1387, 22 sept. 2017, art. 10 et s. Ce dispositif est entré en vigueur lors de la publication des décrets et en tout état de cause au 1er janvier 2018.
Icard J., « Les contours de la pré-justification conventionnelle du motif de licenciement », Cah. soc. déc. 2017, n° 122a6, p. 46.
Étude d’impact du projet de loi d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social, 27 juin 2017, NOR:MTRX1717150L/Bleue-1, p. 36 et s., https://www.legifrance.gouv.fr/affichLoiPreparation.do?idDocument=JORFDOLE000035053536&type=general&typeLoi=proj&legislature=15.
Rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail : JO, 23 sept. 2017.
Il convient de souligner que les ruptures du contrat de travail lors de congé de mobilité ne sont plus soumises au droit du licenciement pour motif économique.
L’article L. 1237-18 du Code du travail s’applique à la fois à la rupture d’un commun accord dans le cadre d’un accord collectif portant rupture conventionnelle et au congé de mobilité.
V. en ce sens, Delmasso R., « La “rupture conventionnelle collective” : une chimère ? », Dr. ouvrier 2017, n° 832, p. 649 et s. Pour cet auteur, le risque n’est d’ailleurs pas écarté.
Ce que nous traiterons dans le II.
Rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, préc.
Marquet de Vasselot L. et Martinon A., « Licenciement pour motif économique – Rupture du contrat de travail et suppression d’emplois (Ord. n° 2017-1387, 22 sept. 2017) », JCP S 2017, 1312, n° 40.
En ce sens, Loiseau G., « Quelques observations sur les ruptures collectives d’un commun accord », SSL, n° 1788, p. 7 ; Marquet de Vasselot L. et Martinon A., « Licenciement pour motif économique – Rupture du contrat de travail et suppression d’emplois (Ord. n° 2017-1387, 22 sept. 2017) », art. préc. ; Mir J.-M. et Aknin F., « Rupture du contrat de travail – Les nouvelles ruptures amiables prévues par accord collectif », JCP S 2017, 1317, n° 23.
Étude d’impact du projet de loi d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social, 27 juin 2017, préc.
Rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, préc.
En ce sens, Loiseau G., « Quelques observations sur les ruptures collectives d’un commun accord », art. préc.
Cir. DGT n° 2009-04, 17 mars 2009, relative à la rupture conventionnelle d’un contrat à durée indéterminée.
Instr. DGT n° 2, 23 mars 2010, relative à l’incidence d’un contexte économique difficile sur la rupture conventionnelle d’un contrat de travail à durée indéterminée, NOR :MTST1081079J.
Ibid.
Exemples de décisions validant les ruptures amiables : Cass. soc., 2 déc. 2003, n° 01-46540 ; Cass. soc., 7 déc. 2004, n° 02-44248 ; Cass. soc., 13 sept. 2005, n° 04-40135.
Boubli B., « Le plan de départ volontaire dans un PSE multifonctions », JCP S 2010, 1383, n° 39.
V. not., Favennec-Héry F., « Plan de départs volontaires : des solutions d’hier aux projets de demain », JCP S 2017, 1251, n° 30-34.
Cass. soc., 12 juill. 2004, n° 02-19175 ; Cass. soc., 1er juin 2017, n° 16-15456.
Cass. soc., 26 oct. 2010, n° 09-15187, note Loiseau G. ; Dr. soc. 2010, p. 1167 – Cass. soc., 21 sept. 2017, n° 16-14423.
Sur l’utilisation de rupture conventionnelle homologuée pour motif économique v., Loiseau G., « Les ruptures conventionnelles pour motif économique », Dr. soc. 2011, p. 681.
V. not., Cass. soc., 11 févr. 2009, n° 08-40095, note Radé C., « Contrat de travail (rupture) : la survivance de l’antique accord de rupture amiable du contrat de travail », RDC 2009, p. 1120. Cass. soc., 8 févr. 2012, n° 10-27176 : RDT 2012, p. 220, obs. Géa F. ; Favennec-Héry F., « Accord de rupture amiable et cause du licenciement », JCP S 2012, 1167. V. égal., auparavant, Radé C., « L’autonomie du droit du licenciement, brefs propos sur les accords de résiliation amiable du contrat de travail et les transactions », Dr. soc. 2000, p. 178 ; Couturier G., « Ruptures conventionnelle et licenciements pour motif économique », RJS 5/11, chron. p. 347.
Favennec-Hery F., « Rupture conventionnelle du contrat de travail : quel domaine ? », SSL, n° 1360, p. 12 ; Lagesse P. et Bouffier N., « Les frontières de la rupture conventionnelle », Dr. soc. 2012, p. 14.
Cass. soc., 9 avr. 2015, n° 13-23588 : Cah. soc. mai 2015, n° 116c3, p. 323, note Loiseau G. ; RJS 102/15, chron. p. 422, note Icard J.
Ces problématiques ont également été évoquées dans notre ouvrage relatif à la cession du contrat de travail. Selusi S., La cession du contrat de travail, Antonmattei P.-H. et Neau-Leduc C. (préf.), t. 70, 2017, LGDJ, Bibl. de droit social, p. 69.
V. Couturier G., « Il n’est de résiliation d’un commun accord que la rupture conventionnelle », Dr. soc. 2015, p. 32.
V. égal., Bento de Carvalho L., « La rupture amiable du contrat de travail à durée indéterminée s’efface devant la rupture conventionnelle », RDT 2014, p. 752.
Cass. soc., 26 oct. 2010, n° 09-15187, préc. Il s’agit d’une décision relative à un plan de départs volontaires autonome.
Cass. soc., 25 sept. 2007, n° 05-41725 ; Cass. soc., 29 avr. 2009, n° 07-44117 ; Cass. soc., 15 déc. 2010, n° 09-43103. V. égal., Cass. soc., 14 sept. 2017, nos 16-20552, 16-20556 et 16-20558.
V. Selusi S., La cession du contrat de travail, op. cit.
C. trav., art. L. 5122-1 et s.
C. trav., art. L. 2254-1, mod. par Ord. n° 2017-1385, 22 sept. 2017, art. 3.
V. dans le sens contraire, Delmasso R., « La “rupture conventionnelle collective” : une chimère ? », art. préc.
C. trav., art. L. 2232-12 ; L’article 40, III, de l’ordonnance n° 2017-1387 mentionne que « les règles de validité des accords visées à l’article L. 2232-12 du Code du travail sont applicables aux accords collectifs portant rupture conventionnelle collective prévus aux dispositions de l’article 10 de la présente ordonnance à la date d’entrée en vigueur de ces dispositions. Dans l’attente de la mise en place du comité social et économique, les attributions de cette instance prévues à l’article 10 de la présente ordonnance sont exercées par le comité d’entreprise ou, le cas échéant, les délégués du personnel ». Si l’on considère que la négociation est ouverte à toutes les entreprises, les articles L. 2232-21 et suivants du Code du travail sont applicables.
Ord. n° 2017-1387, 22 sept. 2017, art. 10.
Dans le même sens, Marquet de Vasselot L. et Martinon A., « Licenciement pour motif économique – Rupture du contrat de travail et suppression d’emplois (Ord. n° 2017-1387, 22 sept. 2017) », art. préc.
Icard J., « Les contours de la pré-justification conventionnelle du motif de licenciement », art. préc.
Lecture combinée de C. trav., art. L. 1237-19-1 et L. 1237-19-4.
V. not., sur ce point, Lokiec P., « Garantir la liberté du consentement contractuel », Dr. soc. 2009, p. 127 et « L’accord du salarié », Dr. soc. 2010, p. 140 ; Fabre-Magnan M., « Le forçage du consentement du salarié », Dr. ouvrier 2012, p. 459.
Lokiec P., « Garantir la liberté du consentement contractuel », art. préc. V. égal. Couturier G., « Les relations entre employeurs et salariés en droit français », in La protection de la partie faible dans les rapports contractuels, 1996, LGDJ, Bibl. de droit privé ; Couturier G., Perulli A., « Le contrat de travail et le droit des contrats », RDT 2007, p. 407.
Pour plus de détails sur l’importance de ce type de procédure afin de garantir la liberté de consentement du salarié dans un processus de mobilité volontaire, v. Selusi S., La cession du contrat de travail, op. cit.
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Plan
- 1Sécurisation du droit de la rupture du contrat de travail
- 1.1La motivation du licenciement après l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017
- 1.2La rupture d’un commun accord dans le cadre d’un accord collectif portant rupture conventionnelle : un nouvel outil de restructuration
- 1.3La réduction et l’harmonisation des délais de prescription de la rupture du contrat par les ordonnances du 22 septembre 2017