La loi, l'accord collectif et le juge répressif face au travail de nuit
L’arrêt du 7 janvier 2020 rendu par la chambre criminelle semble avoir pour objet essentiel de mieux définir le rôle du juge répressif en matière de travail de nuit, celui-ci devant véritablement contrôler la conformité de la justification conventionnelle du recours à cette forme de travail aux strictes exigences légales.
Cass. crim., 7 janv. 2020, n° 18-86293
La réglementation relativement complexe et floue du « travail de nuit » par le Code du travail1 comporte une dimension pénale. L’article R. 3124-15 du Code du travail prévoit en effet que la méconnaissance des diverses dispositions relatives au travail de nuit (justification, contreparties, modes de mise en place, etc.) est punie de l’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe, prononcée autant de fois qu’il y a de salariés concernés par l’infraction. C’est à ce titre que la jurisprudence de la chambre criminelle peut éclairer, avec celle de la chambre sociale, les circonstances « exceptionnelles »2 dans lesquelles il est possible de faire travailler des salariés la nuit. La décision commentée, en date du 7 janvier 2020 et publiée sur le site Internet de la Cour de cassation, nous semble, quant à elle, plus porteuse d’enseignements relatifs au contrôle que le juge répressif doit exercer lorsqu’il est saisi de cette question.
En l’espèce, la société Monop’ et le gérant de l’un de ses établissements[...]
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Baugard D., « La justification du recours au travail de nuit », RJS 2/20, p. 97.
Pour reprendre les termes de l’article L. 3122-1 du Code du travail.
L’arrêt comporte également des motifs relatifs au repos hebdomadaire.
En l'absence d'accord collectif, la période de travail de nuit s’étend de 21 h à 6 h (C. trav., art. L. 3122-20). Définie par un accord collectif, elle doit être d’au moins 9 heures consécutives et comprendre l’intervalle entre minuit et 5 h ; en outre, elle peut commencer au plus tôt à 21 h et s’achever au plus tard à 7 h (C. trav., art. L. 3122-15 renvoyant à C. trav., art. L. 3122-2). Certains secteurs sont soumis à des règles particulières (C. trav., art. L. 3122-3).
V. not. les incertitudes doctrinales nées de la lecture de Cass. soc., 3 avr. 2019, n° 17-11970, PBRI.
Sur le fait que cette lecture de la décision était très partielle, v. Baugard D., « La justification du recours au travail de nuit », RJS 2/20, p. 106, § 23.
Cass. crim., 11 déc. 2018, n° 17-87432, F-D (« le contenu de l'accord collectif du 29 janvier 2014 ne répondait pas aux prescriptions d'ordre public de l'article L. 3122-32 du Code du travail applicable à l'époque des faits ») ; Cass. crim., 16 oct. 2018, n° 17-83703, F-D (« le travail de nuit doit rester exceptionnel et être d'abord justifié par la nécessité d'assurer la continuité de l'activité économique ou des services d'utilité sociale avant que sa mise en place ne soit subordonnée à la conclusion préalable d'une convention ou d'un accord collectif de branche étendu ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement »).
Garé T. et Ginestet C., Droit pénal – Procédure pénale, 11e éd., 2019, Dalloz, Hypercours, n° 397, p. 272.
Site du centre national de ressources textuelles et lexicales : https://www.cnrtl.fr/.
Cass. crim., 2 sept. 2014, n° 13-83304, F-D : RJS 11/14, n° 782.
Cass. crim., 4 sept. 2018, n° 17-83674, F-D : RJS 11/18, n° 675.
V., par ex., Cass. crim., 16 oct. 2018, n° 17-83703, F-D : RJS 1/19, n° 22.
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