L'utilisation d'un véhicule financé par l'indemnité représentative de frais de mandat d'un parlementaire (IRFM) dans le cadre d'une campagne électorale est-elle « indirectement » prohibée ?
La question de l’usage d’un bien financé par l’indemnité, pour le moment forfaitaire, du parlementaire dans le cadre d’une campagne électorale, même si elle ne crée qu’un lien indirect avec la source de financement, risque d’être posée, en dépit des règles restrictives édictées quant à l’usage de cette indemnité.
Suite au constat, en 2012, d’abondements directs d’IRFM au compte de campagne, tous jugés sans prononcé d’inéligibilité par le Conseil constitutionnel, la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 a introduit dans le Code électoral un article L. 52-8-1, disposant que : « Aucun candidat ne peut utiliser, directement ou indirectement, les indemnités et les avantages en nature mis à disposition de leurs membres par les assemblées parlementaires pour couvrir les frais liés à l’exercice de leur mandat ». Certains cas ne révélaient qu’une erreur comptable : par le compte en principe dédié à l’IRFM avaient transité des sommes provenant d’un apport personnel du candidat, et dès lors que celui-ci pouvait en prouver l’origine et le montant, cette erreur était sans incidence1. D’autres cas présentaient en revanche un manquement de fond, l’indemnité ayant financé le compte de campagne. L’IRFM, dotation publique, ne peut financer une campagne électorale, et de ce fait, le compte de campagne a été annulé, ce qui prive les intéressés de remboursement forfaitaire. Le[...]
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Cons. const., 1er mars 2013, n° 2013-4793 : v. Biroste D., « L'interdiction de financer une campagne électorale avec l'IRFM », LPA 12 juill. 2013, p. 22 à 30.
Cons. const., 12 avr. 2013, n° 2013-4845 AN, Guyane, 1re circ.
Le bureau rappelle que la loi ou la jurisprudence prohibent déjà certains usages de l’IRFM : utilisation par un candidat pour sa campagne électorale, dons à des œuvres ou cotisation à un parti politique. Le Bureau a décidé qu’est désormais interdite aussi l’imputation sur l’IRFM de toute dépense afférente à une nouvelle acquisition de biens immobiliers, qu’ils soient destinés à héberger la permanence ou à tout autre usage. Le bureau a retenu une liste de 5 grandes catégories de dépenses autorisées : - frais liés à la permanence (à sa location comme à son fonctionnement) et à l’hébergement du député ; - frais de transport du député (dont acquisition et utilisation d’un véhicule) et de ses collaborateurs ; - frais de communication ; - frais de représentation et de réception ; - frais de formation du député et de ses collaborateurs ».
I. « – Peuvent être imputés sur l’indemnité représentative de frais de mandat :
1° Les frais liés à la permanence et à l’hébergement du député ;
2° Les frais de transport du député et de ses collaborateurs ;
3° Les frais de communication ;
4° Les frais de représentation et de réception :
5° Les frais de formation du député et de ses collaborateurs.
II. – Aucune dépense afférente à l’acquisition d’un bien immobilier ne peut être imputée sur l’indemnité représentative de frais de mandat ».
Rapp. du 18 févr. 2015, p. 32.
Il s’agit évidemment du véhicule personnellement utilisé par le parlementaire, ce qui écarte l’application de l’abondante jurisprudence sur l’usage de véhicules propriété de personnes morales distinctes du candidat : CE, 27 févr. 2013, n° 363933 (ECLI:FR:CESJS:2013:363933.20130227) : « Il résulte de l'instruction que, par décision du 21 septembre 2011, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de M. B., candidat à l'élection cantonale générale des 20 et 27 mars 2011 dans le canton de Marmoutier (Bas-Rhin), au motif que la contribution financière apportée à sa campagne électorale par la société Alsace maintenance SARL, était contraire aux dispositions de l'article L. 52-8 du Code électoral ; qu'il est constant que cette société, dont M. B. est le dirigeant, a mis à la disposition de ce dernier, durant la campagne électorale, deux véhicules ainsi que plusieurs salariés chargés, sur leur temps de travail, du collage des affiches électorales ; que ces prestations doivent être regardées comme des dons d'une personne morale au sens de l'article L. 52-8 du Code électoral ; qu'il s'ensuit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques était fondée à rejeter le compte de campagne de M. B. ».
CE, 26 janv. 2007, n° 279111 : « Considérant que M. A. a inscrit dans son compte de campagne, au titre des dépenses réglées directement par le candidat, une somme de 2 137 € correspondant, à des frais de déplacement, pour un montant de 1 927 € ; que cette dernière somme résulte de l'évaluation par M. A. du coût de l'utilisation de son véhicule personnel et a été calculée, ainsi que l'autorise la commission, sur la base du barème kilométrique admis par l'administration fiscale, lequel prend en compte, outre la consommation de carburant, des éléments tels que la dépréciation du véhicule, ses frais de réparation et d'entretien, les dépenses de pneumatiques, la prime d'assurance, etc. ; qu'elle correspond donc, en application des dispositions précitées de l'article L. 52-12 du Code électoral, à l'estimation par le candidat d'un concours en nature dont il a bénéficié et ne peut dès lors être regardée comme une dépense payée directement par ce dernier, en méconnaissance de l'obligation de recourir à son mandataire ; que c'est donc à bon droit que le tribunal administratif de Strasbourg a retranché les frais de déplacement ainsi évalués des dépenses électorales réglées directement par M. A., en ramenant leur montant à 210 € ; que ce montant est faible (3,08 %) par rapport au total des dépenses du compte de campagne du candidat et négligeable (1,28 %) au regard du plafond des dépenses autorisées ».
CE, 7 mai 2009, n° 323561 : « Une dépense de 5,20 € de lavage de véhicule ne constituant pas des dépenses engagées en vue de l'élection au sens de l'article L. 52-12 du Code électoral, il y a lieu de rectifier la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques… En revanche, il ne résulte pas de l'instruction que les autres dépenses, d'ailleurs inscrites à son compte de campagne par le candidat lui-même, et correspondant à des frais de réception de militants et à des frais de carburant, n'auraient pas été exposées en vue de son élection » ; il en va de même (CE, 30 nov. 2005, n° 273319) : « des frais de lavage de véhicule, pour un montant de 75 €, ainsi que de divers frais de garde-robe d'un montant de 1 013 €, dont il n'est pas établi qu'ils auraient été exposés pour la campagne électorale de l'intéressée » qui sont exclus des dépenses de campagne.
En l’absence d’un tel défraiement, ces dépenses seront considérées comme des concours en nature du candidat ou de personnes physiques. Dans tous les cas, ces frais doivent obligatoirement être justifiés par un état détaillé de ceux–ci. Cet état doit indiquer : la date de chaque déplacement ; les lieux de départ et d’arrivée ; l’itinéraire, le nombre de kilomètres effectués ; l’auteur et l’intérêt électoral du déplacement (le candidat doit joindre une copie de la carte grise du ou des véhicules utilisés). Concernant les dépenses liées aux frais d’autoroute, elle relève de l’appréciation de la commission. Il conviendra en outre de joindre les tickets justificatifs distribués par les automates ».
Cet excès de scrupules, dans ce cas, aura une incidence négative sur les finances publiques : le montant du remboursement forfaitaire augmentera d’autant.
Texte adopté au Sénat à l'article 7 : Doc. Sénat n° 113 « Le bureau de chaque assemblée, après consultation de l'organe chargé de la déontologie parlementaire, définit les conditions dans lesquelles les frais de mandat réellement exposés par les députés et les sénateurs sont directement pris en charge par l'assemblée dont ils sont membres ou leur sont remboursés dans la limite de plafonds qu'il détermine et sur présentation de justificatifs de ces frais. Cette prise en charge peut donner lieu au versement d'une avance. »
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