La responsabilité des professionnels du droit n'est pas subsidiaire…
Trois décisions rendues fin 2015 par la première chambre civile rappellent que la responsabilité des professionnels du droit n’est pas subsidiaire. La victime peut donc agir immédiatement contre le professionnel fautif, quand bien même elle disposerait, en conséquence de la faute commise, d’une action contre un tiers afin d’être rétablie dans ses droits.
Cass. 1re civ., 25 nov. 2015, n° 14-26245
Cass. 1re civ., 25 nov. 2015, n° 15-11115
Cass. 1re civ., 9 déc. 2015, n° 14-25854
C’est une question désormais classique que celle de savoir si la responsabilité des professionnels du droit est ou n’est pas « subsidiaire ». La première chambre civile y apporte une réponse négative dans trois arrêts récents, rendus en novembre et décembre 2015.
Bien qu’ils ne fassent, au fond, que rappeler une solution acquise, ces arrêts méritent d’être signalés. Premièrement, on y trouve une affirmation nouvelle en la forme : « la responsabilité des professionnels du droit ne présente pas un caractère subsidiaire. » Deuxièmement, la fréquence à laquelle la solution est ici posée et la publicité assez large que la Cour a souhaité en faire dans l’une des trois décisions montrent qu’elle n’est pas encore tenue pour évidente par les juges du fond. Enfin, troisièmement, il y a lieu de se demander si cette solution est aussi convaincante et claire que la fermeté des termes employés le laisse au premier abord[...]
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Cass. 1re civ., 28 oct. 2015, n° 14-17518 : « la restitution du dépôt de garantie consécutive à la nullité d’un bail commercial ne constituant pas en soi un préjudice indemnisable, le notaire, garant subsidiaire de la restitution envers la seule partie qui en est créancière, en cas de défaillance avérée de celle qui en est débitrice, ne pouvait être condamné à en garantir le bailleur, celui-ci fût-il insolvable. »
Cass. 1re civ., 7 févr. 1989, n° 87-17383 : Bull. civ. I, n° 68 – Cass. 1re civ., 25 mars 1991, n° 89-21119 : Bull. civ. I, n° 109 – Cass. 1re civ., 26 mars 1996, n° 94-12228 : Bull. civ. I, n° 154 – Cass. 1re civ., 19 déc. 2000, n° 98-14105 : RTD civ. 2001, p. 370, obs. P. Jourdain ; Defrénois 2001, p. 258, obs. J.-L. Aubert.
V. not. Cass. 1re civ., 31 oct. 1989, n° 88-16152 (à propos d’un notaire).
La formule est légèrement différente dans l’arrêt du 9 décembre 2015.
Parmi les nombreuses observations de l’auteur relatives à cette question, v. spéc. J.-L. Aubert, obs. précitées sous Cass. 1re civ., 19 déc. 2000, préc. et Defrénois 2004, p. 1738.
V. not. C. Brière, « La certitude du préjudice dans la responsabilité des professionnels du droit » : Resp. civ. et assur. 2004, étude 17.
Cass. 1re civ., 27 févr. 2013, n° 12-16891 : RTD civ. 2013, p. 609, note P. Jourdain.
Cass. 1re civ., 19 déc. 2013, n° 13-11807 : LPA 31 mars 2014, p. 17, note A.-L. Fabas-Serlooten – Cass. 1re civ., 18 déc. 2014, n° 13-26181.
Cass. 1re civ., 9 déc. 2015, n° 14-25883. Il s’agit d’une décision différente de celle de la même date ici commentée. V. déjà Cass. 1re civ., 2 oct. 2002, n° 99-14656 : RTD civ. 2003, p. 97, obs. P. Jourdain – Cass. 1re civ., 16 avr. 2015, nos 14-16288 et 14-20683 : AJDI 2015, p. 857, obs. J.-P. Borel.
V. not. P. Jourdain, note précitée sous Cass. 1re civ., 27 févr. 2013, n° 12-16891, et RTD civ. 2005, p. 400 ; G. Viney, P. Jourdain et S. Carval, Traité de droit civil, Les conditions de la responsabilité, LGDJ, 4e éd., 2013, n° 287-1 ; P. le Tourneau et alii, Droit de la responsabilité et des contrats, Régimes d’indemnisation, Dalloz Action, 2014, n° 499 ; M. Bacache, Les obligations, La responsabilité civile extracontractuelle, Economica, 2e éd., 2012, n° 360.
V. not. Cass. 1re civ., 16 avr. 2015, nos 14-16288 et 14-20683, préc. (notaire ayant distribué le prix de cession d’un immeuble au mépris de l’existence d’un privilège de prêteur de deniers alors que la banque disposait par ailleurs d’un titre exécutoire et d’une hypothèque et n’avait diligenté aucune procédure d’exécution) – Cass. 1re civ., 19 déc. 2013, n° 13-11807, préc. (avocat n’ayant pas notifié le jugement de condamnation au débiteur alors que le créancier bénéficiait toujours d’une action non prescrite contre ce dernier, dont l’insolvabilité n’était pas alléguée).
Cass. 1re civ., 7 mai 2002, n° 99-14675 (avocat) : JCP G 2003, I, 152, obs. G. Viney – Cass. 1re civ., 6 avr. 2004, n° 01-14434 (avocat séquestre) – Cass. 1re civ., 9 nov. 2004, n° 02-10769 (notaire).
V. Cass. ch. mixte, 8 juill. 2015, n° 13-26686 : RJDA 2015, n° 11, p. 741, rapp. L. Guérin ; D. 2015, p. 2155, note V. Mazeaud ; RTD civ. 2015, p. 895, obs. P.-Y. Gautier ; Contrats, conc., consom. 2015, comm. 253, obs. L. Leveneur ; JCP G 2015, n° 42, 1088, note Y.-M. Serinet ; JCP G 2015, 2374, obs. P. Stoffel-Munck ; JCP E 2015, n° 45, p. 45, note A. Penneau ; Resp. civ. et assur. 2015, n° 11, p. 22, obs. S. Hocquet-Berg ; Gaz. Pal. 2015, n° 266-267, p. 8, note M. Mignot ; Gaz. Pal. 2015, n° 294-295, p. 19, obs. M. Mekki ; Constr.-urb. 2015, n° 10, p. 29, obs. C. Sizaire ; RDC 2015, p. 848, nos obs.
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