Le risque au cœur de l'exception d'inexécution
La Cour de cassation place le risque au cœur de l’exception d’inexécution dans le contrat de bail : risque, d’abord, que prend le locataire qui décide de ne plus payer le loyer en représailles à ce qu’il considère comme un manquement du bailleur à ses obligations ; risque, ensuite, auquel le bailleur expose le locataire et qui peut constituer un manquement à son obligation de lui assurer la jouissance paisible de la chose louée.
Cass. 3e civ., 19 nov. 2015, n° 14-24612
Même s’il repose sur des faits d’une navrante banalité, l’arrêt commenté mêle exception d’inexécution, risque, principe de précaution et manquement du bailleur à son obligation de faire jouir paisiblement le locataire de la chose louée.
Un bailleur avait en l’espèce entrepris des travaux de remplacement d’une toiture qui contenait de l’amiante. Au cours des travaux, un inspecteur du travail avait adressé au locataire deux courriers dans lesquels il évoquait de manière évanescente un risque de propagation d’amiante. Sans y être officiellement contraint, le locataire avait alors pris la décision d’évacuer les locaux pendant deux mois et avait suspendu le paiement des loyers correspondant à cette période. Le propriétaire lui en réclamait néanmoins le paiement. La cour d’appel avait fait droit à sa demande en relevant (1) que des prélèvements d’air effectués le jour de la visite de l’inspecteur du travail s’étaient révélés[...]
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CA Paris, 4 juin 2014 : AJDI 2015, p. 40.
C. Atias, « Les “risques et périls” de l’exception d’inexécution (limites de la description normative) » : D. 2003, p. 1103.
A. Bénabent, Droit des obligations, LGDJ, 14e éd., 2014, n° 387 ; P. Malaurie, L. Aynès et P. Stoffel-Munck, Les obligations, Defrénois, 7e éd., 2015, n° 858 ; P. Malinvaud, D. Fenouillet et M. Mekki, Droit des obligations, Litec, 13e éd., 2014, n° 519 ; F. Terré, P. Simler et Y. Lequette, Les obligations, Dalloz, 2013, 11e éd., n° 630.
Par ex. Cass. 1re civ., 5 mars 1974, n° 72-11884 : JCP G 1974, II, 17707, rapp. M. Voulet : le contractant « a toujours le choix entre la contestation judiciaire et l’exercice à ses risques et périls de l’exception d’inexécution qui ne représente qu’un refus provisoire d’exécuter. »
H. Barbier, La liberté de prendre des risques, préf. J. Mestre, PUAM, 2011, n° 391.
V. la jurisprudence citée par A. Bénabent, Contrats spéciaux civils et commerciaux, LGDJ, 10e éd., 2013, n° 548 ; F. Collart Dutilleul et P. Delebecque, Contrats civils et commerciaux, Dalloz, 9e éd., 2011, n° 488 ; J. Huet, G. Decocq, C. Grimaldi et H. Lécuyer, Les principaux contrats spéciaux, LGDJ, 3e éd., 2012, n° 21179 ; P. Malaurie, L. Aynès et P.-Y. Gautier, Les contrats spéciaux, Defrénois, 6e éd., 2012, n° 682 ; P. Puig, Contrats spéciaux, Dalloz, 6e éd., 2015, n° 658.
Pour l’admission de l’exception d’inexécution lorsqu’un cas de force majeure empêche l’exécution du contrat et justifie une suspension corrélative, v. J. Carbonnier : RTD civ. 1957, p. 327.
Par ex. Cass. 2e civ., 24 févr. 2005, n° 04-10362 : JCP G 2005, II, 10100, note F.-X. Trébulle ; JCP G 2005, I, 149, n° 10, obs. G. Viney ; JCP G 2005, I, 181, n° 5, obs. H. Périnet-Marquet – Cass. 3e civ., 10 déc. 2014, n° 12-26361 : D. 2015, p. 188, note V. Mazeaud ; D. 2015, p. 362, note J. Dubarry et C. Dubois ; D. 2015, p. 124, obs. P. Brun et O. Gout ; D. 2015, p. 1863, obs. L. Neyret ; RTD civ. 2015, p. 134, obs. H. Barbier ; RTD civ. 2015, p. 177, obs. W. Dross ; RTD civ. 2015, p. 399, obs. P. Jourdain ; Dr. et patr. 2015, n° 248, p. 86 nos obs.
C. civ., art. 1220, issu de l’ordonnance n° 2016-131, du 10 février 2016, et A. Pinna, « L’exception pour risque d’inexécution » : RTD civ. 2003, p. 31.
Cass. com., 29 janv. 2013, n° 11-28756 : Contrats, conc., consom. 2013, comm. 74, obs. L. Leveneur.
Cass. soc., 10 avr. 1959 : Bull. civ. IV, n° 450 ; D. 1960, p. 61.
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