La disposition d'un bien indivis à défaut d'accord unanime des indivisaires
Lorsque le juge autorise la licitation d’un bien indivis sur le fondement de l’article 815-6 du Code civil, le prix de vente se substitue au bien cédé de telle manière que l’opération n’est pas soumise aux règles du partage.
Cass. 1re civ., 2 déc. 2015, n° 15-10978
Un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 2 décembre 2015 est l’occasion de revenir sur les voies de droit ouvertes pour disposer d’un bien indivis lorsque l’accord unanime des indivisaires, normalement nécessaire pour accomplir un tel acte, fait défaut.
En l’espèce, deux héritiers sur trois ont saisi le président du tribunal de grande instance sur le fondement de l’article 815-6 du Code civil dans le but d’obtenir l’autorisation de vendre trois véhicules présents dans la masse successorale afin d’acquitter les frais de succession.
Le président du tribunal de grande instance a donné l’autorisation sollicitée et la cour d’appel a confirmé sa décision.
Le troisième héritier a formé un pourvoi en cassation en invoquant le fait que le juge est tenu de respecter les règles liées au partage de l’indivision même lorsqu’il est saisi sur le fondement de l’article 815-6 du Code civil et qu’il ne peut en conséquence ordonner la licitation des biens indivis que si ces derniers ne sont pas commodément partageables en nature.
La Cour de cassation a rejeté le pourvoi. Selon la haute juridiction, « la[...]
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F. Terré et P. Simler, Droit civil, Les biens, Dalloz, 8e éd., 2010, n° 584.
Cass. 1re civ., 16 févr. 1988, n° 86-16489 : Bull. civ. I, n° 45 ; RTD civ. 1989, p. 371, obs. J. Patarin ; RTD civ. 1989, p. 777, obs. F. Zénati. Pour la nomination d’un séquestre, v. Cass. 1re civ., 8 janv. 1991, n° 89-15271 : RTD civ. 1991, p. 780, obs. J. Patarin.
D. Martin, obs. sous CA Versailles, 10 mars 1982 : D. 1983, I.R., p. 347.
J. Patarin, « La double face du régime juridique de l’indivision », in Mélanges en l’honneur de Dominique Holleaux, Litec, 1990, p. 331 et s., spéc. p. 338.
Cette définition négative est inspirée d’un jugement du tribunal de grande instance de Reims en date du 4 janvier 1978 : D. 1979, I.R., p. 44, note A. Breton. L’auteur indique que : « L’urgence naît ici, comme trop souvent, de l’inaction passée : les choses trainent depuis 1973. »
Sur les difficultés soulevées par la définition de l’intérêt commun des indivisaires, v. P. Malaurie et L. Aynès, Droit civil – Les biens, Defrénois, 6e éd., 2015, n° 690 ; J. Patarin, « La double face du régime juridique de l’indivision », préc., spéc. p. 337.
V. toutefois sur le lien nécessaire entre l’intérêt commun des indivisaires et la personnification de l’indivision, F. Zénati-Castaing et T. Revet, Droit civil, Les biens, PUF, coll. Droit fondamental, 3e éd., 2008, n° 351.
V. en ce sens, J. Patarin, obs. précitées sous Cass. 1re civ., 16 févr. 1988, n° 86-16489 ; A. Breton, note sous CA Aix-en-Provence, 2 mars 1983 : D. 1984, jur., p. 145 et s., spéc. p. 148. Selon l’auteur, l’intérêt commun des indivisaires recouvre « tout intérêt quelconque qui appartient aux indivisaires en leur qualité d’indivisaires. »
Rappr. J. Patarin, « La double face du régime juridique de l’indivision », préc., spéc. p. 332 : « Le régime juridique nouveau de l’indivision a donc une double face, l’une tournée vers le respect des droits individuels et fondamentalement égaux de chacun des indivisaires, l’autre tournée vers une gestion rationnelle de l’indivision inspirée par les exigences de l’intérêt commun. »
En ce sens, l’article 826 du Code civil prévoit que : « Chaque indivisaire reçoit des biens pour une valeur égale à celle de ses droits dans l’indivision (…). Si la circonstance de la masse ne permet pas de former des lots d’égale valeur, leur inégalité se compense pas une soulte ».
C. civ., art. 537.
V. F. Zénati-Castaing et T. Revet, Droit civil, Les biens, op. cit., n° 403.
Même si depuis la réforme du 23 juin 2006, l’article 815-10 du Code civil prévoit que les sommes qui viennent en remplacement des biens indivis sont eux-mêmes indivis par le jeu de la subrogation réelle. Sur ce changement, v. W. Dross, Droit civil, Les choses, LGDJ, 2012, nos 173 et s.
V. en ce sens, Cass. ch. réunies, 5 déc. 1907 : S. 1908, 1, p. 5, note C. Lyon-Caen ; GAJC, Dalloz, 13e éd., 2015, t. 1, n° 120. V. aussi Cass. 1re civ., 4 avr. 1991, n° 89-20351 : Bull. civ. I, n° 118 ; RTD civ. 1992, p. 429, obs. J. Patarin ; RTD civ. 1992, p. 791, obs. F. Zénati ; Defrénois 1991, p. 868, obs. G. Champenois – Cass. 1re civ., 31 mars 1992, n° 90-17212 : Bull. civ. I, n° 96. Adde : F. Terré et P. Simler, Droit civil, Les biens, Dalloz, 8e éd., 2010, n° 586-2 ; F. Zénati-Castaing et T. Revet, Droit civil, Les biens, op. cit., n° 363.
Sur la nécessité de déterminer l’actif net avant de procéder au partage, v. F. Zénati-Castaing et T. Revet, Droit civil, Les biens, op. cit., n° 415.
Rappr. F. Zénati-Castaing et T. Revet, Droit civil, Les biens, op. cit., n° 156.
C’est d’ailleurs l’effet recherché par la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006. On sait qu’antérieurement la vente des biens meubles indivis pour payer les dettes successorales pouvait être décidée à la majorité des héritiers. Simplement, la vente devait nécessairement intervenir aux enchères. V. P. Malaurie et L. Aynès, Droit civil, Les biens, op. cit., n° 682.
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