Le dol incident a-t-il vraiment disparu du droit français ?
Un arrêt de la chambre commerciale a été présenté comme condamnant définitivement la figure du dol incident. Outre le fait qu’une telle condamnation n’a ici rien de certain et qu’elle n’est pas forcément opportune, elle semble elle-même condamnée par la réforme du droit des contrats... qui pourrait donc bien signer le retour de la distinction du dol principal et du dol incident.
Cass. com., 30 mars 2016, n° 14-11684
Dol incident, le mal compris. – La notion de dol incident est probablement l’une des plus confuses du droit civil, car cette appellation est utilisée en doctrine pour désigner des réalités différentes1. Généralement, on vise par-là l’hypothèse dans laquelle la victime d’un dol aurait contracté même en son absence mais à des conditions différentes et notamment à un prix autre (par exemple, l’acheteur aurait certes acheté, mais moins cher). Cela étant, il arrive aussi que l’expression soit utilisée pour rendre compte de la sanction seulement, afin d’indiquer que, dans le cas considéré, le dol n’est pas sanctionné par la nullité mais simplement par l’allocation de dommages-intérêts, voire une réfaction du prix (à supposer que la réfaction pour dol existe2). Or il se peut très bien que, dans un cas où il est avéré que l’errans n’aurait certainement pas contracté s’il avait connu la vérité, même à des conditions différentes, il choisisse tout de même in fine (essentiellement pour[...]
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V. pour une clarification salutaire, D. Bakouche, « La prétendue inconsistance de la distinction du dol principal et du dol incident » : JCP G 2012, n° 29, 851.
Sur ce point, v. RDC 2012, p. 1180, obs. sous Cass. 3e civ., 6 juin 2012, n° 11-15973.
V. not. Cass. 3e civ., 22 juin 2005, n° 04-10415 : Bull. civ. III, n° 137 ; RDC 2005, p. 1025, obs. P. Stoffel-Munck ; Contrats, conc., consom. 2005, comm. 186, note L. Leveneur.
V., considérant que le nouvel article 1130 condamne le dol incident, N. Dissaux, C. Jamin, Commentaire du projet d’ordonnance, Dalloz, 2015, obs. sous art. 1130.
J. Flour, J.-L. Aubert et E. Savaux, Droit civil. Les obligations 1. L’acte juridique, Sirey, 16e éd., 2014, n° 214, p. 220 (souligné dans le texte).
Ibid.
J. Ghestin, G. Loiseau et Y.-M. Serinet, Traité de droit civil, La formation du contrat, t. 1, Le contrat – Le consentement, LGDJ, 4e éd., 2013, n° 1465, p. 1195.
P. Stoffel-Munck, obs. précitées sous Cass. 3e civ., 22 juin 2005, n° 04-10415.
V. N. Dissaux, C. Jamin, préc.
Y.-M. Serinet : LPA 4 sept. 2015, p. 59.
Mais étant précisé bien sûr que, même en cas de dol principal, la victime reste parfaitement libre de choisir la seule allocation de dommages-intérêts si elle ne souhaite pas obtenir la nullité.
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