L'exception d'inexécution doit-elle être proportionnée ?
La durée de la relation contractuelle et l’absence d’information préalable ne suffisent pas à établir que la suspension immédiate du contrat par une partie est disproportionnée aux manquements commis par l’autre.
Cass. 1re civ., 12 mai 2016, n° 15-20834
L’exception d’inexécution est une institution connue : ripostant à l’inexécution dont il est victime, l’excipiens suspend volontairement l’exécution de ses propres obligations. Jusqu’à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, elle n’était toutefois régie par aucun texte de portée générale1. Elle conservait en outre – et conservera encore demain – une part d’ombre, qui vient pour l’essentiel de ce que ses fonctions sont multiples. Parmi elles, les deux principales sont celles de garantie et d’incitation à l’exécution2 : l’exception d’inexécution est à la fois un mécanisme défensif de sauvegarde des intérêts de l’excipens et un mécanisme comminatoire par lequel l’excipiens fait pression sur son cocontractant pour qu’il s’exécute. Or, suivant qu’on insiste sur sa fonction de bouclier ou au contraire d’épée, ses conditions doivent être appréciées différemment. Cela vaut particulièrement pour la condition de proportionnalité de la riposte au manquement initialement commis3. Le bouclier ne peut en effet être élevé que dans la mesure requise par l’attaque, sauf à paralyser le contrat au-delà de ce qui[...]
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V. désormais C. civ., art. 1219 et C. civ., art. 1220, réd. Ord. n° 2016-131, 10 févr. 2016.
Sur lesquelles, v. part. J.-F. Pillebout, Recherches sur l’exception d’inexécution, préf. P. Raynaud, LGDJ, coll. Bibl. dr. privé, 1971, t. 119, nos 229 et s.
V. déjà Rép. civ. Dalloz, V° « Exception d’inexécution », 2011, n° 16.
V. C. Malecki, L’exception d’inexécution, préf. J. Ghestin, LGDJ, coll. Bibl. dr. privé, 1999, t. 321, spéc. nos 326 et s. ; C. Popineau-Dehaullon, Les remèdes de justice privée à l’inexécution des contrats, Étude comparative, préf. M. Goré, LGDJ, coll. Bibl. dr. privé, 2008, t. 498, spéc. nos 161 et s.
Cass. 1re civ., 19 oct. 1999, n° 97-17762, D. Posant également une condition de suffisante gravité du manquement, v. not. Cass. com., 29 janv. 2013, nos 11-28576 et 11-28979 – Cass. 3e civ., 3 juin 2004, n° 02-19263, D.
Cass. 3e civ., 26 nov. 2015, n° 14-24210, D, refus de paiement du solde des travaux en présence de malfaçons.
Cass. com., 27 janv. 1970, n° 67-13764 : JCP 1970, II 16554, note A. Huet ; RTD civ. 1971. 136, obs. Y. Loussouarn – Adde : Cass. com., 10 déc. 1979, n° 78-11956 : Bull. civ. IV, n° 327 – Cass. com., 26 mai 1981, n° 79-15606 : Bull. civ. IV, n° 248.
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