La non-invocabilité du droit européen en situation contractuelle
La norme harmonisée européenne doit être interprétée en ce sens qu’elle ne lie pas le juge national saisi d’un litige portant sur l’exécution d’un contrat de droit privé imposant à une partie de fournir un produit de construction conforme à une norme nationale transposant cette norme harmonisée, qu’il s’agisse du mode d’établissement de la conformité aux spécifications contractuelles d’un tel produit de construction ou du moment auquel la conformité de celui-ci doit être établie.
CJUE, 27 oct. 2016, no C-613/14, James Elliott
Rapport horizontal et invocabilité directe des règles de droit européen. – Le thème de l’invocabilité directe des règles européennes dans les rapports horizontaux, sous-entendu entre personnes de droit privé et, plus particulièrement, entre cocontractants, n’est pas d’un accès facile.
L’idée fausse serait de croire que cette sorte de difficulté se résout exclusivement par des critères formels de type : invocabilité directe totale des règlements de l’Union européenne et invocabilité directe partielle des directives de l’Union européenne1.
Comme cela a été montré dans une précédente contribution2, l’analyse formelle cède le pas à l’analyse matérielle chaque fois que, d’un point de vue formel, il n’y a pas d’obstacle de principe à une invocabilité. Autrement dit, dès lors qu’en la forme, une réglementation européenne est potentiellement[...]
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Pour un panorama des solutions qui gouvernent l’invocabilité des règles juridiques dans un contexte global, v. notre ouvrage, L’application du droit national, international, européen, 2013, Dalloz, nos 93 et s.
V., à propos de la non-invocabilité directe des règles prudentielles applicables en matière bancaire, la RDC 2005, p. 1197.
CJUE, 27 oct. 2016, n° C-613/14.
V., en ce sens, arrêt du 18 octobre 2012, Elenca, n° C-385/10, EU:C:2012:634, point 15.
V. sur ce point l’analyse proposée in « La summa divisio en droit de l’Union européenne : Une question pour qui ? Une question pour quoi ? » in Bonnet B. et Deumier P. (dir.), De l’intérêt de la summa divisio droit public-droit privé ? (Actes du colloque de St-Étienne, oct. 2009), 2010, Dalloz, p. 45. On pourrait imaginer que le standard ait une origine privée, comme c’est très souvent le cas en matière de normalisation, v. sur ce thème : Bismuth R. (dir.), Les aspects juridiques de la standardisation internationale privée, 2014, Bruylant.
Entre autres exemples, on songe notamment à la fameuse saga des arrêts Viking et Laval qui ont placé les acteurs privés (ici des syndicats professionnels représentant de salariés) en situation de devoir respecter immédiatement des règles européennes relatives aux activités de libre établissement ou de libre prestation de services (sur cette jurisprudence, v. en particulier : Freedland M. et Prassl J. (dir.), Viking, Laval and Beyond, 2014, Hart Publishing ; sur la résistance que cette jurisprudence a suscitée au niveau national, v. Supiot A. (dir.), « Les gardiens des droits sociaux en Europe », SSL nov. 2016, supplément, p. 1 et s.).
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