L'étendue des nouveaux pouvoirs unilatéraux du contractant
L’admission de pouvoirs unilatéraux par la réforme du droit des contrats est plus spectaculaire que novatrice. Si le pouvoir de fixation du prix ou encore celui de résoudre unilatéralement le contrat tranchent avec les anciennes dispositions du Code Napoléon, l’un et l’autre étaient d’ores et déjà admis par la jurisprudence. Ces pouvoirs unilatéraux ne sont cependant pas pour autant négligeables : ils modifient en effet le caractère de l’intervention du juge, qui n’est désormais plus ni préventive ni créatrice d’une situation nouvelle…
1. Pouvoirs unilatéraux : une expression neuve. – L’expression de « pouvoirs unilatéraux du contractant » est récente. Elle n’émerge qu’au seuil du XXe siècle, dans un contexte plutôt publiciste. Elle évoque alors une forme de domination d’une partie sur l’autre1, exhalant au civiliste les relents d’une potestativité venimeuse. Nos anciens auteurs étaient plus familiers d’autres notions, telle celle de « faculté »2. Encore cette dernière se concevait-elle mieux en droit des successions3 ou des biens4 que des contrats5, au point que le Code civil ignorait jusqu’il y a peu l’obligation facultative6. Demogue s’essaya cependant à acclimater les facultés au contexte[...]
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Cruet J., Étude juridique de l’arbitraire gouvernemental et administratif, 1906, Rousseau, p. 122. L’auteur utilise cette expression pour désigner la discipline que l’État peut imposer à ses agents, un lien de subordination somme toute. Adde Guillouet M., Caractère juridique de l’occupation des édifices du culte depuis la loi de séparation, 1936, Rennes, p. 27.
V. déjà Pothier R.-J., Coutumes d’Orléans, 1845, Videcoq, n° 33, p. 338, annoté par Bugnet J.-J. : selon l’auteur, il existe une pure faculté « lorsque cette faculté procède de la liberté naturelle, telle qu’est la faculté que chacun a d’élever sa maison qui n’est sujette à aucune servitude à telle hauteur que bon lui semblera, ou lorsqu’elle procède de quelques dispositions de droit public, telles que sont celles que chacun a en Beauce de mener paître ses troupeaux sur les terres vaines de ses voisins ». Les facultés imprescriptibles de l’article 2262 sont ainsi celles « qui résultent de la nature ou de la loi, ou qui sont l’exercice de la liberté ou de la propriété, ne peuvent se perdre par prescription parce qu’elles dérivent en quelque sorte d’un titre qui se renouvelle chaque jour et que, à celui qui les a, il n’est point besoin d’une action pour les conserver ». Adde Baudry-Lacantinerie G. et Tissier A., Traité théorique et pratique de droit civil. 9, De la prescription, 1895, Larose, p. 102, n° 163. Ces auteurs déroulent la litanie de ces facultés imprescriptibles, évoquant ainsi notamment « le droit d’aller et de venir ou d’exercer une industrie se rattache à la liberté de chacun ».
C. civ., art. 773 : « À défaut de sommation, l’héritier conserve la faculté d’opter, s’il n’a pas fait par ailleurs acte d’héritier et s’il n’est pas tenu pour héritier acceptant pur et simple en application des articles 778, 790 ou 800. »
C. civ., art. 2262 : « Les actes de pure faculté et ceux de simple tolérance ne peuvent fonder ni possession ni prescription. »
C. civ., art. 1659 : « la faculté de rachat est un pacte par lequel le vendeur se réserve de reprendre la chose vendue, moyennant la restitution du prix principal et le remboursement dont il est parlé à l’article 1673 du Code civil ».
V. désormais, C. civ., art. 1308 : « L’obligation est facultative lorsqu’elle a pour objet une certaine prestation mais que le débiteur a la faculté, pour se libérer, d’en fournir une autre. »
Demogue R., Les notions fondamentales du droit privé : Essai critique, pour servir d’introduction à l’étude des obligations, 1911, Rousseau, p. 178.
Demogue R., Les notions fondamentales du droit privé : Essai critique, pour servir d’introduction à l’étude des obligations, 1911, Rousseau, p. 415.
Cass. com., 10 juill. 2007, n° 06-14768 : JCP G, 2007, 10154, note Houtcieff D. ; D., 2007, p. 2839, note Stoffel-Munck P. – Cass. 3e civ., 9 déc. 2009, n° 04-19923 : Bull. civ. III, n° 275 ; RTD civ. 2011, p. 105, obs. Fages B. ; Gaz. Pal. 8 avr. 2010, n° I1257, p. 17, obs. Houtcieff D. ; RDC 2010, p. 561, obs. Laithier Y.-M. et Mazeaud D.
Fenouillet D, « La notion de prérogative : instrument de défense contre le solidarisme ou technique d’appréhension de l’unilatéralisme ? », RDC 2011, p. 644 et s., spéc. n° 3.
V. C. civ., art. 1164 : « Dans les contrats cadre, il peut être convenu que le prix sera fixé unilatéralement par l’une des parties, à charge pour elle d’en motiver le montant en cas de contestation ; en cas d’abus dans la fixation du prix, le juge peut être saisi d’une demande tendant à obtenir des dommages et intérêts et le cas échéant la résolution du contrat. » ; v. C. civ., art. 1165 : « Dans les contrats de prestation de service, à défaut d’accord des parties avant leur exécution, le prix peut être fixé par le créancier, à charge pour lui d’en motiver le montant en cas de contestation. En cas d’abus dans la fixation du prix, le juge peut être saisi d’une demande en dommages et intérêts. »
Cass. ass. plén., 1er déc. 1995, n° 91-15999 : Bull. ass. plén., n° 7 : « Lorsqu’une convention prévoit la conclusion de contrats ultérieurs, l’indétermination du prix de ces contrats dans la convention initiale n’affecte pas, sauf dispositions légales particulières, la validité de celle-ci, l’abus dans la fixation du prix ne donnant lieu qu’à résiliation ou indemnisation ». − Cass. ass. plén., 1er déc. 1995, n° 93-13688 : Bull. ass. plén., n° 9 : « L’article 1129 du Code civil n’étant pas applicable à la détermination du prix, l’abus dans la fixation de celui-ci ne donne lieu qu’à résiliation ou indemnisation. » − Cass. ass. plén., 1er déc. 1995, n° 91-19653 : Bull. ass. plén., n° 8 : « La clause d’un contrat de franchisage faisant référence au tarif en vigueur au jour des commandes d’approvisionnement à intervenir n’affecte pas la validité du contrat, l’abus dans la fixation du prix ne donnant lieu qu’à résiliation ou indemnisation. »
Cass. com., 26 févr. 1991, n° 89-12808 : D. 1992, somm., p. 199, obs. Paisant G. ; l’arrêt évoque le caractère « potestatif de la stipulation du prix » et se fonde sur les anciens articles 1129, 1170 et 1591.
Le site www.lextenso.fr ressort 53 résultats à la requête « abus dans la fixation du prix », 26 résultats si la recherche est restreinte du 1er janvier 2000 jusqu’à aujourd’hui.
Ce contentieux tend le plus souvent à obtenir la compensation des dettes du débiteur et des dommages-intérêts résultant de la fixation fautive du prix : par ex. Cass. com., 27 janv. 2015, n° 13-18656 : Bull. civ. IV, n° 10.
Après tout, en matière de vente, le prix peut être laissé à l’estimation d’un tiers. C. civ., art. 1592.
Troplong R.-T., De la vente, ou Commentaire du titre VI, du livre III du Code civil, p. 202, www.bit.ly/2EsbObv ; adde à propos de l’art. 1129 : Laurent F., Principes de droit civil, t. 28, n° 131, p. 138, www.bit.ly/2FTSpkc.
Pothier R.-J., Œuvres de Pothier. Traité du contrat de vente, 1827, Pichon-Béchet, n° 26. Selon Pothier, la stipulation signifie que les parties renvoient la fixation du prix à un tiers, dont il leur faudra convenir.
Pardessus et Tripier, 1821 S., 2, p. 37, spéc. p. 35, sous CA Paris, 6 mai 1819, www.bit.ly/2ptT0iq. Ces auteurs citent la loi n° 25 § 1er dig. De contr. Empt., la loi 13 Code. Contra. Empt. ; Loi 17 de verb. Oblig. Ces auteurs ajoutent : « ce que réprouve [le Digeste] c’est tout ce que s’est proposé le Code dans l’article 1591, quand il a exigé que le prix fût déterminé et désigné par les parties : il a voulu qu’une seule ne se réservât pas exclusivement le droit de fixer le prix de la chose vendue. Il ne fait en cela qu’appliquer la loi 8 de oblig. et act, qui se trouve littéralement conservée dans notre Code par l’article 1174 ».
Cass. civ., 30 avr. 1822 : S. 1822, 1, 62, www.bit.ly/2FSAF9a. Cette décision rejette le pourvoi formé contre une décision rendue par la Cour de Paris, à propos de laquelle Pardessus avait livré la consultation évoquée ci-dessus. Conformément à la thèse soutenue par l’auteur, la cour d’appel avait en l’espèce estimé que « l’usage d’acheter et de vendre (…) moyennant bon prix et satisfaction a existé de tout temps, et n’a reçu aucune atteinte par les dispositions du Code ».
Demogue écrivait ainsi : « quant à l’application de cet article, on se trouve encore en face de deux interprétations possibles. On peut rattacher l’article 1129 à cette idée que les obligations doivent avoir un objet sérieux. On ne saurait promettre du blé sans plus, car on pourrait s’exécuter en donnant une quantité dérisoire. Si on adopte cette explication, il suffira que la quantité promise soit dès à présent déterminée ou déterminable soit actuellement, soit dans l’avenir. Si au contraire, on rattache l’article 1129 à une idée de protection pour les contractants qui doivent pouvoir calculer dès maintenant l’étendue de leurs obligations au moins de façon approximative, il faudra ne pas tenir comme suffisante la désignation d’un objet qui ne peut être dès à présent déterminée, même avec une simple approximation ». À l’époque où il écrit – 1906 – Demogue observe que la doctrine n’a pas tranché entre ces conceptions : « nous serions portés à croire que la seconde interprétation, ou plutôt la seconde tendance, car il ne saurait être question ici de rien de précis, ne peut qu’être préférée ». V. Demogue R., Des droits éventuels, hypothèses où ils prennent naissance, nature et effets, 1906, p. 30.
Cass. req., 5 févr. 1934 : Gaz. Pal. 1934, p. 331 : « attendu que les parties ont entendu prendre pour base le tarif [du vendeur] applicable à toute la clientèle au moment de l’achat, et ont ainsi déterminé le prix d’après des éléments tenant au cours général de ces marchandises et qui ne dépendait plus de la volonté ni de l’une ni de l’autre des parties ». Dans le même sens, v. Cass. com., 4 nov. 1952 : Gaz. Pal. 1953, p. 84 − Cass. com., 1er févr. 1972 : Bull. civ. IV, n° 44 − Cass. com., 18 déc. 1972 : D. 1973, p. 662 − Cass. 1re civ., 13 mars 1973, n° 70-13858 : Bull. civ. I, n° 96.
C. civ., art. 1163, al. 2 et 3 : « L’obligation a pour objet une prestation présente ou future ; Celle-ci doit être possible et déterminée ou déterminable. »
Cass. 1re civ., 30 juin 2004, n° 01-00475 : Bull. civ. I, n° 190, p. 157. Dans le même sens, TPI Nouméa, 4 oct. 2010 : « De plus, cette sanction ne saurait être prononcée en l’espèce, dès lors que l’abonné dispose contractuellement du droit de résilier le contrat chaque année et qu’il n’est nullement établi que le coût de l’abonnement à chacun des dictionnaires permanents fixés entre 1 075 FF et 2 491 FF de 1982 à 1997 et passé à 500 € en 2006 par abonnements soit constitutif d’un abus. »
Faisant peser la charge de la preuve sur la partie se prévalant de l’abus : CA Metz, 1re ch. civ., 20 sept. 2016, n° 16/00324.
CA Poitiers, 1re ch. civ., 24 avr. 2015, n° 13/03585 : « En l’espèce, le prix était déterminable à l’occasion de la conclusion des contrats de vente successifs distincts de la convention-cadre du 10 mars 2005 souscrits à l’occasion de chaque commande. En effet, la société verse aux débats les documents relatifs aux tarifs applicables les 5 novembre 2007, 11 juillet 2008, 9 février 2009, 29 septembre 2009, 21 avril 2010, 5 mai 2010 et 29 mai 2010 confirmant ainsi que l’information préalable à chaque commande était disponible pour le revendeur. » Adde T. com. Orléans, 21 nov. 2013, n° 2012011719 : « attendu que la société Initial a régulièrement adressé à Monsieur YX des factures mensuelles produites aux débats, et que ce dernier, en professionnel avisé, aurait dû demander des explications à son fournisseur et éventuellement contester des augmentations de prix excessives ».
Par ex. adde Cass. com., 4 nov. 2014, n° 11-14026 : « qu’en l’état de ces motifs, dont il ressort que les prix unilatéralement fixés par la société Camargo, excessifs dès l’origine, ne permettaient pas à la société Larzul de faire face à la concurrence, la cour d’appel a pu retenir que la société Camargo avait abusé de son droit de fixer unilatéralement le prix des marchandises ; que le moyen n’est pas fondé » ; adde Cass. com., 5 juill. 2016, n° 14-28879 : « Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, l’arrêt retient que les prix consentis à la société La Croix pain étaient anormalement bas lorsque le fonds était exploité par les époux X qui avaient intérêt à sous-facturer les livraisons faites à eux-mêmes ; qu’il constate qu’à la suite des hausses intervenues, les prix pratiqués par la société Boulangerie étaient conformes à ceux du marché ; que par ces constatations, dont il ressort que les augmentations décidées par la société Boulangerie n’avaient pas empêché la société La Croix pain de pratiquer des prix concurrentiels, ni ne l’avait obligée à revendre à perte. »
Rochfeld J., « Les droits potestatifs accordés par le contrat », in Études offertes à J. Ghestin, Le contrat au début du XXIe siècle, 2001, LGDJ, p. 747 et s., spéc. n° 13.
Cass. com., 6 juin 2000, n° 97-12260 : « appréciant souverainement les faits et les éléments de preuve qui lui étaient soumis, l’arrêt retient d’abord que la société Esso n’avait aucun intérêt à pratiquer un prix dissuasif pour sa clientèle dans le point de vente de M. X ; qu’il constate ensuite qu’il n’est pas établi qu’elle aurait fixé ses prix uniquement en fonction de ses propres intérêts et au détriment de ceux de M. X ; que la cour d’appel a ainsi légalement justifié sa décision sans inverser la charge de la preuve ».
CA Bourges, 1re ch. civ., 19 oct. 2017, n° 16/01595. Cette décision sanctionne l’abus dans la fixation du prix, au motif que n’avaient pas été respectées les modalités fixées consistant en une réunion rassemblant les parties concernées et en tentant compte des « évolutions du marchés et des tendances communiquées par la profession ».
CA Paris, 1er oct. 2014, n° 12/11167 : « peut être considéré comme abusif, dans certaines configurations de marché, un prix de vente sans rapport ou excessivement disproportionné par rapport aux coûts effectivement supportés ou sans rapport avec les prix pratiqués par des concurrents, sur des marchés comparables, et pour des produits équivalents ».
CA Limoges, ch. civ., 29 sept. 2015, n° 14/01430 : « Attendu, sur l’absence de détermination d’un prix précis de la marchandise vendue, que la société Soufflet fait très justement observer que le prix de la farine est tributaire des fluctuations incessantes et importantes du cours du blé sur les marchés mondiaux ; qu’en tout état de cause, le prix de la farine fournie restait déterminable par référence aux conditions générales du tarif de vente de la société Soufflet que M. X ne pouvait ignorer puisque cette entreprise était son fournisseur habituel ; que la seule circonstance que ce prix puisse être supérieur à celui de concurrents, hors toute appréciation de la qualité du produit, ne peut suffire à caractériser un abus dans la fixation du prix, étant au surplus rappelé que l’engagement d’approvisionnement constituait la contrepartie de facilités de règlement d’un arriéré de factures impayées au moyen d’un prêt consenti par la société Soufflet ; que les demandes de M. X tendant à la résiliation de la convention du 14 mars 2012 et à l’allocation de dommages-intérêts seront rejetées. »
T. com. Dijon, 10 avr. 2014, n° 2012005324 : « Attendu enfin que les factures et devis versés au débat par la SARL Mads, pour démontrer que le prix pratiqué par Monsieur X est excessif, ne permettent pas de comparer une prestation équivalente à celle facturée par Monsieur X et sont dès lors insuffisants pour caractériser l’abus dans la fixation du prix invoqué par la SARL Mads ».
Sur l’application de la loi dans le temps, refus d’application au motif que la loi n’est pas en vigueur, sans évoquer le fait que ce soit un « effet légal », T. com. Nantes,14 déc. 2017, n° 2016010451. Dans le même sens, TGI Bobigny, 6e ch., 4e sect., 29 janv. 2018, n° 15/05384.
V. en ce sens, Lemay P : « La réduction du prix du contrat en cas d’exécution imparfaite : un pas en avant, deux pas en arrière ? », D. 2018, p. 567.
V. Lemay P., D. 2018.
En ce second cas, notons en passant que le pouvoir du juge serait distinct de celui dont il dispose – ou non – en matière de fixation d’honoraires, qui n’est pas restreint par la défectuosité de la prestation et qui est précisément exclu lorsque les honoraires ont été réglés.
Chénedé F., « La réduction du prix », RDC 2017, n° 114k3, p. 571.
Article 9:401 : la réduction est « proportionnelle à la différence entre la valeur de la prestation au moment où elle a été offerte et celle qu’une offre d’exécution conforme aurait eue à ce moment ».
Par exemple, pour une vente d’un bien valant 500 dans l’état où il se trouve, alors que le prix convenu était de 800, et dont le prix de marché du marché serait évalué à 900, le calcul serait le suivant : 800 (PC)x500(Prestation)/900 (PM), le prix réduit est alors de 444 €.
Si l’on reprend les mêmes chiffres : 800 (PC) – (900 (PM)-500 (Prestation), soit 400 €.
L’auteur ajoute : « Si cette disparité entre le prix convenu et le prix du marché peut être initiale, elle peut également apparaître ou évoluer en cours d’exécution. Le créancier insatisfait aura donc tout intérêt à prendre en compte l’évolution des prix entre la conclusion et l’inexécution du contrat : tandis que la baisse des cours pourrait donner l’avantage à la réduction du prix, sa hausse pourrait l’encourager à solliciter des dommages-intérêts ».
Ajoutons que l’article 1223 du Code civil n’impose pas expressément au juge de s’en tenir à une réduction proportionnelle.
T. com. Guéret, 28 févr. 2018, n° 2016001550 : « Attendu que l’article 1223 du Code de procédure civile (sic) dispose que le créancier, après une mise en demeure, peut accepter une inexécution imparfaite du contrat et solliciter une réduction proportionnelle du prix ; Le tribunal constatera que la SCI M2E a payé (sic) la SAS Dagard avant qu’elle n’exécute son obligation, que la réduction du prix peut être unilatérale, et dira que la SAS Dagard est tenue de rembourser la SCI M2E des travaux non exécutés, soit la somme de 4 825,09 € en principal. »
CA Paris, 1-5, 6 févr. 2018, n° 17/19996. Cette décision a été rendue sur recours de : T. com. Évry, 13 juin 2017, n° 2017F00172, assignation (aff. nouvelle).
V. par ex. « Attendu qu’en application de l’article 1315, alinéa 1 du Code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, alors applicable, il appartient à celui qui se prévaut de l’inexécution défectueuse de ses obligations par son cocontractant pour obtenir une réduction du prix des prestations qu’il a reçues ou une indemnité destinée à réparer son préjudice, d’établir tant la nature que la gravité des manquements allégués et d’apporter la preuve, tant de l’existence que du montant du dommage qu’il allègue » : T. com. Paris, 19e ch., 21 févr. 2018, n° 2016051093.
Comp. T. com. Manosque, 12 oct. 2010, n° 2010003506 : « Constatons que la demande tendant à la résiliation anticipée du contrat du 26/07/2005 aux torts de la SARL Brasserie Le Paladio et au paiement d’une clause pénale contractuelle, se heurte à des difficultés sérieuses qui rendent incompétent le juge des référés. »
Sur cette consécration, v. Jamin C., « Les sanctions unilatérales de l’inexécution du contrat : trois idéologies en concurrence », in Jamin C. et Mazeaud D., L’unilatéralisme et le droit des obligations, 1999, Paris, Economica, p. 71 ; Aynès L., Delebecque P. et Stoffel-Munck P., « Rupture unilatérale du contrat : vers un nouveau pouvoir », Dr. & patr. mensuel, n° 126, p. 55 ; Amrani-Mekki S., « La résiliation unilatérale des contrats à durée indéterminée », Defrénois 30 mars 2003, n° 37688, p. 369 ; Mazeaud D., « L’introduction de la résolution unilatérale pour inexécution − Rapport français », RDC 2010, p. 1076.
Cassin R., De l’exception d’inexécution dans les rapports synallagmatiques (exceptio non adimpleti contractus) et de ses relations avec le droit de rétention, la compensation et la résolution, thèse, 1914, Librairie du Recueil Sirey, p. 359.
V. Cass. com., 7 févr. 2018, n° 16-20352 : D. 2018, p. 537, note Mazeaud D. ; JCP G 2018, doctr. 331, n° 12, obs. Grosser P. ; Gaz. Pal. 10 avr. 2018, n° 320a4, p. 25, obs. Houtcieff D.
Encore certaines décisions du fond ont-elles curieusement admis un tel cumul : T. com. La Rochelle, 8 déc. 2017, n° 2017003713 « De ce fait, aux termes des articles 1223 et 1226 du Code civil, elle a retenu paiement à ses risques et périls, sans notifier préalablement à la société Jubelin que sa prestation était imparfaite et qu’il entendait le réduire proportionnellement, lui permettant ainsi de parfaire dans un délai raisonnable, l’exécution de sa part du contrat. »
Cass. 3e civ., 14 déc. 2017, n° 16-24170, PB : RDC 2018, n° 114z5, p. 29, obs. Deshayes O.
Cette dernière entraînerait la nullité de l’obligation, par application de l’article 1304-2 du Code civil.
Cassin R., De l’exception d’inexécution dans les rapports synallagmatiques (exceptio non adimpleti contractus) et de ses relations avec le droit de rétention, la compensation et la résolution, thèse, 1914, Librairie du Recueil Sirey, p. 360.
T. com. Nancy, 29 mars 2017, n° 2017002712.
TGI Paris, 3e ch. 1re sect., 16 nov. 2017, n° 16/06303 ; TGI Paris, 3e ch. 3e sect., 23 mars 2018, n° 15/18773.
C. civ., art. 1226, al. 4 : « Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l’inexécution ». Adde Cass. 3e civ., 15 sept. 2015, n° 13-24726 ; Cass. 1re civ., 6 févr. 2013, n° 12-12750. Adde encore CA Paris, 5-4, 7 juin 2017, n° 15/23296.
Une pareille question paraît en effet échapper à la compétence du juge des référés telle qu’elle résulte de l’article 808 du Code de procédure civile. Comp. T. com. Manosque, 12 oct. 2010, n° 2010003506 : « Constatons que la demande tendant à la résiliation anticipée du contrat du 26/07/2005 aux torts de la SARL Brasserie Le Paladio et au paiement d’une clause pénale contractuelle, se heurte à des difficultés sérieuses qui rendent incompétent le juge des référés. »
Tel semble déjà le parti pris par le TGI de Paris : v. TGI Paris, 3e ch. 1re sect., 16 nov. 2017, préc. ; TGI Paris, 3e ch. 3e sect., 23 mars 2018, préc.
C. civ., art. 1352-7 : « celui qui a reçu de mauvaise foi doit les intérêts, les fruits qu’il a perçus ou la valeur de la jouissance à compter du paiement. Celui qui a reçu de bonne foi ne les doit qu’à compter du jour de la demande ».
Par ex. T. com. La Rochelle, 11 mars 2016, n° 014004690.
Comp. T. com. Paris, 11 déc. 1986 : Gaz. Pal. 1987, p. 377. Si les conditions prévues par la clause résolutoire sont acquises avant le jugement d’ouverture, la résolution est également acquise. Adde CA Versailles, 19 mars 1992, n° XVE190392X : D. 1992, somm. p. 259, obs. Derrida F. − Adde pour la constatation judiciaire de l’applicabilité de la clause résolutoire : Cass. 3e civ., 8 déc. 1999, n° 98-15025 : Bull. civ. III, n° 235.
Girard P.-F., Manuel élémentaire de droit romain, 5e éd., 1911, Paris, Rousseau, p. 534.
T. com. Roanne, 20 avr. 2016, n° 2015F00041 ; T. com. La Rochelle, 28 janv. 2011, n° 2009003991 ; T. com. La Rochelle, 19 mai 2011, n° 2011002155 ; T. com. Toulon, 9 févr. 2011, n° 2010R00168.
De vieilles décisions l’ont admis, interdisant d’agir en résolution celui qui s’est mis dans l’impossibilité de restituer, v. Cass. civ., 2 juin 1886 : S.1890, 1, 379, www.bit.ly/2pyEUfB ; CA Bordeaux, 7 mars 1845 : S 1846, 2, 179, www.bit.ly/2pycEK2.
TGI Créteil, 3e ch. civ., 27 févr. 2017, n° 14/09962 : « S’il est admis que la partie poursuivie en exécution d’un contrat synallagmatique puisse suspendre la réalisation de ses engagements en opposant à l’autre partie l’inexécution de ses prestations, encore faut-il qu’elle rapporte la preuve d’une inexécution fautive revêtant une gravité suffisante. »
TGI Marseille, 2e ch. civ., 24 janv. 2017, n° 16/13108.
Cassin R., De l’exception d’inexécution dans les rapports synallagmatiques (exceptio non adimpleti contractus) et de ses relations avec le droit de rétention, la compensation et la résolution, thèse, 1914, Librairie du Recueil Sirey, p. 359. L’auteur écrit, à propos de la « rupture unilatérale » – c’est-à-dire la résolution unilatérale : « la rupture unilatérale qui vient précéder la déclaration judiciaire de rupture toujours lente à venir, et renforcer à l’avance l’effet qu’elle pourra produire, chaque fois que la cause de la résolution est d’un ordre particulièrement grave (inexécution créant un péril pour le contractant, violation de l’obligation de bonne foi créant une atmosphère de suspicion), ou d’un ordre particulièrement facile à discerner (rupture évidente de l’équilibre à corriger) ».
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Plan
- 1Les nouveaux pouvoirs unilatéraux du contractant
- 1.1Les nouveaux pouvoirs unilatéraux du contractant – Présentation
- 1.2L’étendue des nouveaux pouvoirs unilatéraux du contractant
- 1.3L’exercice des nouveaux pouvoirs unilatéraux du contractant
- 1.4Le contrôle des nouveaux pouvoirs unilatéraux du contractant
- 1.5Les nouveaux pouvoirs unilatéraux du contractant – Synthèse