Le locataire doit-il justifier, dès l'envoi de son congé, du motif lui permettant de bénéficier d'un délai de préavis réduit ?
Dans certaines situations expressément visées par le législateur, le locataire bénéficie d’un délai de préavis réduit : un mois au lieu de trois. S’inscrivant dans une lignée jurisprudentielle assez bien établie, l’arrêt commenté retient que le locataire n’a pas à indiquer au bailleur, dans son congé, le motif lui permettant de bénéficier du délai réduit. Cette solution très (trop ?) protectrice du locataire est directement remise en cause par la loi ALUR, applicable aux baux conclus au-delà du 27 mars 2014.
Cass. 3e civ., 15 nov. 2018, n° 16-26477
Si le délai normal de préavis donné par le locataire est de trois mois dans les baux d’habitation, de nombreuses situations particulières, précisément énumérées par le législateur à l’article 15-I de la loi du 6 juillet 1989, lui permettent de bénéficier d’un préavis réduit. Ces « faveurs » législatives décrivent les bonheurs ou les souffrances jugés suffisamment importants pour que les intérêts du bailleur (disposer d’un délai nécessaire pour trouver un autre locataire) soient sacrifiés : l’obtention d’un premier emploi, la mutation, la perte d’un emploi, l’état de santé précaire, la perception d’allocations réservées aux personnes ayant de faibles ressources (revenu minimum d’insertion, revenu de solidarité active, allocation adulte handicapé)… Mais le locataire doit-il, lorsqu’il[...]
L'accès à l'intégralité de ce document est réservé aux abonnés
CA Toulouse, 19 mars 1996 : Loyers et copr. 1997, comm. 99, obs. Vial-Pedroletti B. – CA Rennes, 17 juin 1999 : Loyers et copr. 2000, comm. 65, obs. Vial-Pedroletti B.
Cass. 3e civ., 8 déc. 1999, n° 98-10206 : Bull. civ. III, n° 236.
CA Paris, 4 juin 1999 : Loyers et copr. 2000, comm. 3, obs. Vial-Pedroletti B. – CA Limoges, 18 nov. 1997, Loyers et copr. 1998, comm. 91, obs. Vial-Pedroletti B. – Rappr. Cass. 3e civ., 7 juill. 2004, n° 03-14439 : Bull. civ. III, n° 143 ; AJDI 2004, p. 889, obs. Rouquet Y. : « le tribunal, qui n’était pas tenu de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a retenu à bon droit, que le fait que les locataires n’aient justifié que tardivement de cette mutation ne les privait pas de leur droit à donner congé avec un délai de préavis réduit ».
Cass. 3e civ., 30 juin 2010, n° 09-16244 : Bull. civ. III, n° 135 ; D. 2010, p. 1788, obs. Rouquet Y. ; D. 2011, p. 1189, obs. Damas N. : « le fait que le locataire ne s’en soit pas prévalu [du fait d’être allocataire du RMI] dans son congé ne le privait pas du droit de bénéficier du délai de préavis réduit que lui reconnaissait la loi d’ordre public ».
Damas N., Des Lyons H., Marot G. et Rouquet Y., Droit et pratique des baux d’habitation, 9e éd., 2017, Dalloz, nos 533.31 et 533.71 pour la reprise pour habiter, nos 534.31 et s. et 534.121 pour le congé pour vendre, n° 535.31 pour le congé pour motif légitime et sérieux.
Contra, Cass. 3e civ., 18 févr. 2003, n° 01-13303 : Bull. civ. III, n° 39 ; D. 2004, p. 843, obs. Damas N., jugeant que l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 n’impose pas que le locataire justifie être bénéficiaire du RMI concomitamment à la délivrance du congé.
Testez gratuitement Lextenso !