Droit de préférence du locataire à bail commercial : nouvelles précisions !
Cass. com., 23 mars 2022, no 20-19174
Quels étaient les enjeux de cet arrêt ?
Depuis presque huit ans1, l’article L. 145-46-1 du Code de commerce offre au preneur à bail commercial la faculté de pouvoir acquérir par préférence (par priorité) le local qu’il loue, dès lors que son propriétaire souhaite le mettre en vente. C’est peu de dire que, en théorie comme dans les faits, ce droit de préférence a créé, depuis l’origine, de nombreuses tensions et qu’il a donné lieu à des prises de position parfois très diversifiées2. Or, cette situation place régulièrement le praticien dans l’embarras, puisque l’enjeu est alors celui de la validité même de la vente immobilière réalisée, ni plus, ni moins.
En pratique, une question se pose fréquemment, celle de savoir si ce droit de préférence s’applique lorsque la vente projetée intervient de gré à gré en liquidation judiciaire3.
Telle était la question précise qui était soumise à l’appréciation des hauts magistrats dans l’affaire ayant donné lieu à la décision ici rapportée du 23 mars 20224.
Quels étaient les faits ?
Une société est mise en liquidation judiciaire. Par une première ordonnance, le juge-commissaire autorise la vente de gré à gré d’un immeuble de cette société, immeuble qui est partiellement loué à bail commercial. Dans le cadre de la réalisation de cette vente, il est procédé à la notification du projet[...]
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L. n° 2014-626, 18 juin 2014, art. 14 : JO, 19 juin 2014.
Récemment encore, concernant la lecture qu’il convient de faire de l’arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 23 septembre 2021 : v. infra dernière question.
V. not. M. Cazajus, « La pratique notariale du droit des entreprises en difficulté », CRIDON Sud-Ouest janv. 2021, coll. Brochures n° 9, n° 103, p. 63.
Cass. 3e civ., 23 mars 2022, n° 20-19174, FB : Dalloz actualité, 5 avr. 2022, obs. B. Ferrari ; DEF flash 30 mars 2022, n° DFF203s8.
CA Paris, 2 juill. 2020, n° 20/02344.
Ainsi que sur le visa des articles L. 642-18 et R. 642-37-1 du Code de commerce. Cette partie de l’arrêt du 23 mars 2022 ne fera pas ici l’objet d’un commentaire, puisqu’elle ne concerne pas directement l’exercice du droit de préférence légal d’acquisition du preneur à bail commercial.
En effet, « la vente des immeubles d’un débiteur en liquidation judiciaire par le liquidateur, fût-elle de gré à gré, est une vente qui (…) ne peut être faite que d’autorité de justice » (Cass. com., 16 juin 2004, n° 01-17185 : Bull. civ. IV, n° 125 ; Defrénois 30 avr. 2005, n° 38148, p. 695, note P. Roussel Galle) ; v., pour une analyse précise de ce point, F. Pérochon, Entreprises en difficulté, 10e éd., 2014, LGDJ, Manuel, Droit privé, n° 1202, p. 537.
V. déjà, pour cette analyse, P. Viudès et F. Roussel, Les ventes immobilières et l’article L. 145-46-1 du Code de commerce (le droit de préférence du locataire à bail commercial), CRIDON Sud-Ouest déc. 2018, coll. Brochures n° 8, n° 63, p. 54.
Très exactement, les conditions qui devront être spécifiquement notifiées seront celles qui dérogent aux conditions qui, en général, accompagnent une telle vente ; v. spéc. P. Viudès et F. Roussel, Les ventes immobilières et l’article L. 145-46-1 du Code de commerce (le droit de préférence du locataire à bail commercial), CRIDON Sud-Ouest déc. 2018, coll. Brochures n° 8, n° 106, p. 82.
Voire par adjudication amiable, si l’on retient que, par nature, aucun prix ne pourrait être déterminé et donc notifié au jour de la décision de vendre (rappr. Cass. 3e civ., 17 mai 2018, n° 17-16113 : Bull. civ. III, n° 51 ; DEF flash 28 mai 2018, n° DFF145m8 ; AJDI 2018, p. 578, étude P. Viudès et F. Roussel, AJDI 2018, p. 605, avis B. Sturlèse et obs. J.-P. Blatter ; RTD com. 2018, p. 605, obs. F. Kendérian).
Sur les successions vacantes, v. P. Viudès et C. Albouy, L’intervention de l’administration dans le règlement des successions, CRIDON Sud-Ouest 2012, coll. Brochures n° 5, nos 186 et s., p. 108 et s.
Cass. 3e civ., 28 juin 2018, n° 17-14605 : Bull. civ. III, n° 76 ; DEF 27 sept. 2018, n° DEF140b4, obs. F. de La Vaissière ; DEF 18 oct. 2018, n° DEF141d6, obs. C. Grimaldi ; DEF 5 juill. 2018, n° DEF138f4 ; D. 2018, p. 1736, avis P. Burgaud, et D. 2018, p. 1740, note P. Viudès et F. Roussel ; RTD com. 2018, p. 605, obs. F. Kendérian.
Cass. 3e civ., 23 sept. 2021, n° 20-17799, FS-B : DEF 28 oct. 2021, n° DEF204a3, obs. P. Vignalou ; DEF 7 oct. 2021, n° DEF203s2 ; et surtout Rev. Loyers 2021/1021, n° 3754, analyse V. Zalewski-Sicard.
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